Aujourd’hui, on aborde un aspect particulier de l’argent dans le minimalisme : les promesses que l’argent achèterait le bonheur. Avoir de l’argent rend-il automatiquement heureux? Le manque d’argent est-il une cause irrémédiable d’insatisfaction ? Dans cette émission, on aborde ces questions sous l’angle d’une vie plus simple dans le monde moderne.
Acheter des objets ou des expériences?
Dans la littérature minimaliste, on incite souvent les personnes à acheter des expériences plutôt que des objets pour en tirer davantage de satisfaction. Est-ce vrai? D’après la chercheuse en psychologie positive Sonja Lyubomirsky : « oui, mais »
Selon ses recherches, les expériences sont plus satisfaisantes que les objets pour trois raisons :
- Il est moins facile de comparer des expériences que des objets
- On garde de meilleurs souvenirs plus longtemps d’une expérience de d’un achat d’objet
- Les expériences apportent des dimensions supplémentaires par rapport au matériel : apprentissage, lien social, créativité…
Mais on peut tirer les bénéfices de ces expériences avec des objets à condition d’utiliser ces objets comme des expériences. Par exemple, un pinceau et de la peinture peuvent apporter la même satisfaction qu’une expérience si nous les utilisons effectivement pour peindre.
Cela étant, dans ma vision du minimalisme, je ne recommanderais pas de systématiquement remplacer l’achat d’objets par l’achat d’expériences. Si vous n’avez pas les moyens, il est toujours plus sage de garder son argent, même si cela paraît évident. De plus, on peut très bien consommer des expériences en gardant l’état d’esprit consumériste – c’est-à-dire chercher à fuir nos émotions ou nos besoins réels en suivant la fausse promesse d’une pub pour un voyage par exemple.
Pour moi, le minimalisme est une question d’état d’esprit : garder les produits à leur juste place d’outil qui remplissent un besoin réel, que ces produits soient des objets matériels ou des expériences.
Pauvre et malheureux?
La question inverse du sujet du jour serait : est-ce que le manque d’argent rend systématiquement malheureux? Toujours d’après Sonja Lyubomirsky, certaines conclusions se retrouvent parmi les différentes recherches menées sur le sujet :
- En-dessous d’un certain seuil de revenus, le manque d’argent nuit au bonheur, car on n’a pas toujours de quoi subvenir aux besoins de base
- Mais au-delà d’un certain seuil, ou les besoins matériels sont comblés, gagner plus d’argent ne rend pas plus heureux. À cause de l’adaptation hédonique, on s’habitue très vite au confort de vie et on replonge dans une certaine insatisfaction
Que faire pour se satisfaire au mieux de ce qu’on a, que ce soit modeste ou aisé?
Dans le cas d’un foyer modeste, ce que recommanderait un état d’esprit plus minimaliste, c’est de commencer par ne pas croire les promesses de bonheur de la pub. Bien sûr, quand il s’agit de trouver de quoi payer la nourriture ou les factures, cela crée un stress bien réel que seule une entrée d’argent peut améliorer.
Mais dans beaucoup de situations, nous sommes frustrés par toutes les injonctions à la consommation qui nous entourent (nouvel iPhone, nouveau manteau…), ce qui crée une insatisfaction parce que nous n’avons pas les moyens de se les payer. C’est là que le minimalisme peut aider : en se rappelant que vous n’avez pas besoin de toutes ces choses et que les objets ne comblent pas nos aspirations profondes ni n’empêchent les émotions négatives. Pour les bourses réduites, cela permet aussi d’éviter des achats inutiles et de mettre un peu de côté pour alléger le stress de trouver de quoi subvenir à nos vrais besoins matériels.
L’état d’esprit minimaliste
Un autre sujet sur lequel le minimalisme peut aider quand on a une bourse serrée, c’est au niveau de l’état d’esprit. Souvent, on vit le manque de moyens comme une contrainte : on est bien obligé de ne pas se payer d’objets puisqu’on n’a pas d’argent pour le faire.
Pour moi, ce qu’apporte le minimalisme, c’est une intention derrière la frugalité. Si on trouve son pourquoi, les valeurs que l’on défend (que ce soit autour de l’écologie, de l’éthique sociale, des animaux ou autres), alors on peut faire d’une vie frugale un choix conscient et en accord avec nos valeurs, plutôt qu’une contrainte par manque de moyens.
Pour un foyer plus aisé
Si vos finances vous permettent de subvenir à vos besoins de base, alors le minimalisme pourrait aider à contrecarrer cette fameuse adaptation hédoniste propre à l’être humain.
Au lieu de trouver notre confort de vie normal et se plaindre de ne pas avoir encore davantage, ce qui crée de l’insatisfaction, nous pouvons cultiver des pratiques de gratitude et d’appréciation qui permettent de garder conscience de la chance que nous avons de vivre dans ce confort matériel.
Éviter la comparaison
Se comparer au voisin est la meilleure manière d’être insatisfait par notre niveau actuel de revenus, et ce quel que soit le niveau en question. Souvent, on se compare avec des gens du même milieu social, ce qui élève les attentes.
Comme le souligne encore une fois Sonja Lyubomirsky, se comparer aux autres n’est jamais bénéfique pour le bonheur et la satisfaction. Alors, que vous ayez peu de moyens ou que vous soyez plus aisé, je ne peux que vous conseiller d’éviter la comparaison avec les voisins, les collègues, les amis ou la famille. Peu importe le train de vie des autres, ce qui importe, c’est que vous choisissiez des objets qui sont adaptés à vous – votre mode de vie, vos goûts et vos valeurs.
Je pense que là aussi, le minimalisme peut aider, parce que cette philosophie ramène le choix des objets à nos critères internes et non externes. Si vous savez pourquoi vous avez acheté telle gamme d’objet et pas une autre, si vous avez pris le temps de le sélectionner en fonction de vos critères à vous, vous aurez peut-être plus tendance à en être satisfait, même si le voisin en a un plus gros et plus cher.
Contrairement à un état d’esprit consumériste ou l’objet devient un symbole de statut social, dans ma vision du minimalisme, nous achetons uniquement les objets qui ont une certaine utilité (même si elle est esthétique), et non pour « montrer » quoi que ce soit aux autres. Du coup, on se trouve naturellement moins aux prises avec la comparaison.
Qu’est-ce qui nous rend vraiment heureux? par Sonja Lyubomirsky
Pour la ressource du jour, je vais vous présenter le livre duquel j’ai tiré les informations citées ci-dessus : « Qu’est-ce qui nous rend vraiment heureux? » par Sonja Lyubomirsky.
Chercheuse en psychologie positive, elle résume de manière simple et claire les différentes recherches menées autour du bonheur en les rassemblant par thème : autour de l’argent, du travail, du couple, etc.
Si vous ne connaissez pas, la psychologie positive est une discipline scientifique qui cherche non pas à étudier les dysfonctionnement mentaux, comme peut le faire la psychologie classique, mais à étudier comment une personne en bonne santé mentale peut devenir plus heureuse.
Si vous avez envie d’en savoir plus sur la psychologie positive, je vous invite à découvrir ce livre à la fois très précis et documenté, et abordable à la lecture.
Ressources mentionnées au fil de l’émission
- Podcast Happier, par Gretchen Rubin (en anglais)
- Chaîne Youtube The Financial Diet (en anglais)
- Pierre Rabhi, Vers la sobriété heureuse.
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La prochaine émission sera publiée début novembre 2018 et concernera le minimalisme et les vêtements. L’industrie textile est l’une des plus emblématiques du consumérisme, où nous sommes invités à changer de garde-robe à chaque saison. On se parlera de simplifier la garde-robe et remettre le vêtements à sa juste place…